Exploit réalisé
Réalisé le 7 septembre 2015

Ascension « Le Grand Capucin »

  • Discipline : Sport de montagne > Alpinisme
  • Handicap : paraplégie D6/D7
  • Réalisé par : Vanessa Francois
  • Nationalité : belge
  • Lieu : Chamonix

« Le Grand Capucin »

Comme c’est vertigineux de pouvoir accomplir un rêve complètement improbable!!! Je n’arrive pas raccrocher ces 3 jours passés en montagne au réel. Comme si, grâce à l’énergie de tous, j’étais entrée dans une autre dimension, presque celle de la poésie ( oui, oui, je sais l’entreprise a l’air un peu bourrin mais quand même !!)…Et oui grâce à Liv Sansoz, Fabien Dugit et Cédric Lachat, Bertrand Delapierre en paroi et aussi à toute l’équipe du camp de base et porteurs : Juliette Claye, Mathilde Emonet, Marcelle Emonet, Eliza Sprecher, Laurent Soyris, Boris, Paul Robach, Maxime Magnani, Sylvain Pétrop, Stéphane Gayraud, Thomas Bekker, Tim Green (pilote de paramoteur hors pair !), j’ai pu gravir le Grand Capucin par la voie « l’ Echo des Alpages ».
Nous nous sommes arrêtés à 2/ 3 longueurs du sommet car l’inclinaison de la paroi ne me permettait plus de grimper mais nous sommes allés jusqu’au bout du plaisir et de nos possibilités et c’est ça qui compte !!!

Je vais tenter de vous faire partager ces journées fabuleuses toutes en générosité, compétence et beau temps juste au moment où tout le monde était disponible. Hé oui, la montagne était complice aussi !
Je voudrais vraiment saluer l’énergie et le temps que toute l’équipe a consacré à ce projet qui relevait bien de LA grosse expédition. Deux semaines auparavant, Cédric et Fabien avaient fixé des cordes le long de toute la voie pour nous faciliter la tâche.
Dimanche 6 septembre, une équipe monte au pied du Grand Capucin pour poser le camp de base et préparer l’ancrage de la tyrolienne qui me servira à passer le crux des 3 premières longueurs qui ne sont pas raides du tout.
En effet, avec mon système de grimpe, j’ai besoin d’être dans le vide sinon je frotte trop contre le rocher et le risque de me faire mal aux jambes est réel et puis surtout je n’avance pas une cacahuète !! Ils vont aussi matérialiser une piste d’atterrissage pour le paramoteur piloté par Tim green……
Hé oui, nous avons décidé d’utiliser ce moyen pour m’acheminer au camp de base car les passages de crevasses avec ma luge auraient été un peu scabreux au vu de l’état du glacier en ces temps de post canicule. Et puis, ce n’est pas pour me déplaire ce genre d’idée, en plus avec un pilote comme Tim, ce n’est qu’un supplément de sensation d’irréel et de beauté !!

Lundi 7 septembre : Enfin, je peux me lancer dans l’aventure !!! Hé oui, ça fait un moment que je vis avec cette idée de retrouver la lumière qui se reflète sur l’incomparable granit du Grand Capucin, elle m’a permis de tenir le cap cette dernière année qui n’a pas été facile côté santé… Et aussi, de renouer avec l’esprit de cordée « extra-ordinaire », la confiance…

Nous prenons donc l’incroyable benne du Skyway.
Et pendant que tout le monde s’occupe à terminer le portage vers le camp de base et la mise en place du paramoteur, je sirote un cappuccino puis quelques ristretto en compagnie de Marcelle. Evidemment, impossible de ne pas profiter de ces petits bijoux de saveurs (heu…j’adore le café !!). J’avoue que je commence à m’impatienter. Enfin, Paul vient me chercher pour « embarquer »…d’abord, enfilage de la combi duvet puis rentrer dans la luge avec une micro sellette, et hop, tractage jusqu’au déco.

Ca y est, on s’envole vers le camp de base. Atterrissage sans soucis et je retrouve toute la fine équipe qui m’a préparé un bel accueil.

Pas trop le temps de faiblir quand même, c’est de l’alpinisme, il faut maintenir le rythme et j’ai tellement envie d’aller grimper!! La montre court un peu plus vite que ce nous souhaiterions mais ça nous forcera à jouer la carte de l’adaptation tout au long de ce périple car rien ne se passe comme nous l’avions prévu mais je retrouve une belle partie de l’alpinisme qui me plaît : faire face à l’inconnu, réagir, faire au mieux, rester calme. Et puis, il y a une telle entente au sein de l’équipe. Chacun est nécessaire pour la réussite de ce projet et est toujours à fond dans ce qu’il y a à faire. Quel bel échange d’énergie…qui me permet d’accéder à un sentiment de liberté des plus jouissif !! Finalement, c’est bien toujours au travers de l’autre que l’on a un peu plus accès à soi… J’avoue volontiers mon émotion quand Fabien et Cédric ont décidé de faire partie de cette ascension car leur ultra compétence, nous a permis de faire face à la complexité de ce rêve ambitieux. Ajouté à cela la confiance de Liv, son incomparable efficacité en matière de logistique et puis aussi son « habitude » de dormir avec moi en portaledge qui lui permet d’appréhender tous mes besoins avant même que j’y pense ( je me demande bien combien elle a de cerveaux, tiens ??) Toute cette synergie m’a permis de me sentir à ma place là au beau milieu de ces montagnes, je n’oublie évidemment pas d’apprécier cette chance même s’il ne faut pas se dormir dessus !

Pour aller plus vite, Tim m’amène avec son moteur presque jusqu’au pied du Grand Cap.

Là, Cédric et Liv me préparent un montage « hyper sophistiqué » qui devrait me permettre de remonter la tyro d’env. 150m.
Pendant que tout le monde autour de moi est au petit soin. J’ai tellement hâte de grimper mais l’heure tourne. Enfin, je m’accroche à la tyro, je commence à grimper mais, c’est bizarre, tout ne se passe pas comme au gymnase…je ne comprends pas pourquoi la tyro est juste 15x plus longue !!
Je n’arrive vraiment pas à trouver une position correcte pour grimper, mes côtes sont cisaillées si j’ai déjà mal juste au début, je n’ose imaginé plus tard et puis, ce n’est pas comme si j’avais des muscles en surplus, j’ai peur de ne pouvoir me dénouer au réveil …Du coup, j’accepte que Fab et Cédric me hisse le long de la tyro. La prise de décision, ça fait aussi partie de l’alpinisme, non ?
Arrivée à la fin de la tyro, hop, je passe sur les épaules de Fab et Ced reste derrière pour me maintenir les jambes pour une fin d’escalade (vraiment pas facile pour eux ce passage) jusqu’à la vire où je bivouaquerai avec Liv et Bertrand.

Je les attends bien sagement dans le duvet avec thermos et vivres de course.
C’est certain qu’une vire est bien plus confortable qu’un portaledge mais je suis un peu stressée par le fait de ne pas sentir une partie de mon corps qui sortirait de l’aire du matelas et se comprimerait alors contre le sol avec pour résultat une escarre….ca va me valoir une belle bataille avec mon duvet au coucher du soleil pour m’assurer plus ou moins la bonne position. Pffffou, ça donne chaud tout ça !
Dès que Liv arrive à la vire, elle s’attelle à préparer le repas, toujours plus qu’aux petits soins pour moi, elle est trop classe ! Après une bonne nuit et un bon petit déj, je n’ai qu’une envie, c’est de grimper !!!
Enfin, je me retrouve suspendue à la corde et Cédric m’éloigne la corde de la paroi pour que je puisse évoluer.
Il va faire cela toute la journée et après, il se demande pourquoi il est essoufflé….Heu, je crois que Cédric adore aller jusqu’au bout de lui-même et du coup, plus c’est compliqué, plus c’est le pied pour lui !!!
J’avoue que je n’ai même pas essayé de comprendre les manip de cordes abracadabrantes qu’il nous a faites, je lui ai totalement fait confiance !!
C’était magique de me retrouver dans ces longueurs superbes de grimpe avec Liv toujours au travail pour le hissage et autres « menus » ouvrage….
C’était bon aussi de retrouver la force tranquille et la confiance de Fabien.
J’aimais bien aussi les voir maniper ensemble avec Cédric au relais, ça déroule tranquille même si c’est compliqué, ils se connaissent tellement !

Et Bertrand aussi nous a bien aidé entre 2 prises de vues !!

Nous avons grimpé assez vite (parole du camp de base qui nous observait attentivement et nous a écrit un beau message d’encouragement) pour arriver au plus haut de nos possibilités.
Le temps d’apprécier ce moment et hop, descente fulgurante en rappel accrochée à Cédric jusqu’à la vire où nous allons repasser la nuit.
Ahlàlà, quelles journées, je suis heureuse mais j’ai tellement l’impression que tout cela va trop vite…Ce n’est pas tous les jours que je vais passer par là…Je suis absolument dans le mouvement présent, j’ai assez vite oublié l’idée de me laisser aller mes émotions, ça ce sera pour plus tard au coin de la cheminée parce que là, il s’agit d’être à la hauteur de mes compagnons de cordée et de ce rêve !!

Le lendemain matin, lever tranquille, petit déjeuner servi « au duvet » par Liv et Bertrand. Je m’imprègne du paysage et de la chaleur du soleil.
J’attends l’arrivée de mon « taxi » pour la rimaye……Cédric qui, malgré une très mauvaise nuit, va m’amener à bon port sur la chaise de camping au pied du grand Cap.
Ca me fait plaisir de retrouver Maxime au pied, toujours empli de bonne humeur, d’énergie et qui a cru à ce projet depuis le début. Pendant que je me prépare à regagner le camp de base en luge tractée par Sylvain et Stéphane. J’entends le sifflement que font les sacs de hissage lorsqu’ils descendent le long de la tyrolienne, c’est qu’il y en a du matos à rapatrier !

Au camp de base, accueil royal, Juliette me sert le thé avec du gâteau.
Attention, décollage imminent….j’enfile la combinaison, la luge et c’est parti….pour survoler le massif !!! C’est trop beau !!! J’avoue que c’est un mélange assez étrange d’émotions qui m’habite à ce moment là.

Je suis contente d’avoir passé ces 3 jours en montagne et d’être en paramoteur là maintenant mais j’aurai tellement envie d’y rester au royaume des cimes…Mais bon, le mouvement, aller de l’avant, c’est la vie, non ??? Alors, je me laisse apprécier tout ça et à ressentir l’énergie que tous ont donné pour aboutir….à un atterrissage complètement improbable de Tim et moi en combinaison d’expé à ski sur l’herbe !!!

Le lien vers la vente de dvd: http://www.vanessafrancois.com/?p=1769

Le teaser du documentaire "Rêver sous les étoiles":
https://vimeo.com/141145217


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Vanessa François
Site : ww.vanessafrancois.com

L'exploit en images